Appel des scientifiques et des patients pour une campagne d’envergure.

Communiqué de presse

Chaque année en France, 6 400 nouveaux cas de cancers sont liés aux papillomavirus humains (HPV). Dans la majorité des cas, les cancers liés à l’infection par HPV concernent le col de l’utérus (44 %), l’anus (24 %) et l’oropharynx (22 %). Si les cancers surviennent en majorité chez la femme, un quart touche les hommes (Fiche Repères INCA-Mai2018). Le cancer du col de l’utérus demeure l’un des seuls cancers pour lequel le pronostic s’aggrave en France, avec un taux de survie à 5 ans après le diagnostic en diminution (68 % sur la période 1989/93 contre 62 % sur la période 2005/2010). Le dépistage, outil majeur de prévention secondaire du cancer du col de l’utérus, ne peut suffire seul et n’est pas assez déployé.

Des vaccins, outils de prévention primaire sûrs et efficaces pour tous les cancers induits par l’HPV, sont disponibles depuis 2007. En France, ceux-ci ont été recommandés immédiatement pour les filles. Il a fallu attendre fin 2019 pour qu’un nouveau pas soit franchi en recommandant la vaccination universelle de tous les adolescents, suivi en 2021 de l’annonce de son remboursement.

Cette vaccination reste pourtant très mal appliquée en France. En 2022, la couverture vaccinale des filles âgées de 16 ans était de 41,5% pour celles ayant reçu 2 doses de vaccin et celle des garçons au même âge a péniblement atteint 8,5%, toujours pour 2 doses de vaccin (données Santé Publique France-Avril 2023). La plupart des pays à haut niveau de revenus font beaucoup mieux (environ 70 à 90% garçons et filles).

L’objectif du plan cancer d’atteindre une couverture vaccinale de 80% à l’horizon 2030 et l’annonce récente par le Président de la République, d’une campagne de vaccination généralisée en classe de 5ème, souligne une volonté politique forte pour améliorer cette situation.
Les sociétés médicales signataires et les associations de patients, regroupées dans un collectif, en prennent acte et insistent aujourd’hui sur l’urgence à réunir tous les moyens nécessaires au déploiement de cette mesure. Elle ne doit pas rester isolée mais s’intégrer dans un programme général et coordonné de lutte contre les cancers HPV induits.

– Faciliter l’application de la campagne vaccinale pour les mineurs, à l’école et dans les autres lieux de vaccination
– Favoriser la création de nombreux lieux de vaccination, en particulier grâce à l’extension déjà annoncée des compétences vaccinales des pharmaciens, sages-femmes et infirmiers.
– Mettre les vaccins à disposition dans les lieux de consultation médicale.
– Permettre un rattrapage vaccinal jusqu’à l’âge de 26 ans, quel que soit le sexe.
– Rendre la vaccination HPV gratuite pour tous, quel que soit le lieu de vaccination.
Tout ceci restera lettre morte s’il n’y est pas associé une campagne d’information massive sur vaccination et dépistage, aussi bien vers la population que vers les professionnels de santé.
C’est pourquoi le collectif lance aujourd’hui un appel aux pouvoirs publics, à la communauté médicale, à la société civile, aux associations de patients et aux médias :
  • Il est primordial d’associer à la vaccination des collégien de 5ème une large campagne d’information nationale à destination du grand public, adultes et adolescents, des professionnels de santé et de la communauté éducative.
  • La vaccination en milieu scolaire sera un élément indispensable mais insuffisant isolément. L’expérience de vaccination à l’école dans le Grand-Est montre que 20% des parents ont consenti à la vaccination de leur enfant et seuls 16% des élèves ont pu être effectivement vaccinés.
  • L’extension des compétences vaccinales aux pharmaciens, sages-femmes et infirmiers permettra d’augmenter le nombre de vaccinateurs potentiels. Elle doit être accompagnée de la mise à disposition des vaccins dans les cabinets médicaux.
  • Le rattrapage vaccinal devrait être généralisé jusqu’à au moins 26 ans pour des raisons médicales et parce que la période Covid a gêné la vaccination de beaucoup d’adolescents qui ont maintenant dépassés l’âge de 19 ans.
  • L’éducation nationale jouera également un rôle important vis-à-vis de la promotion de la santé et de la vaccination. L’ensemble des membres de la communauté éducative ainsi que les parents et les élèves devraient être impliqués. Un message fort et uni, permettrait une meilleure adhésion et également un rattrapage auprès des adolescents et jeunes adultes, au-delà de ce rendez-vous vaccinal en classe de 5ème. Des réponses communes sont nécessaires pour faire face à une éventuelle défiance et à la désinformation sur le sujet.
  • L’élimination amorcée des cancers HPV induits, telle qu’annoncée par l’OMS à l’horizon 2030, ne pourrait devenir un objectif réaliste que si le programme vaccinal s’accompagne d’une campagne de dépistage du cancer du col, qui ne doit pas être ignoré et qui concerne encore la plus vaste majorité des femmes aujourd’hui âgées de 25 à 65 ans qui n’ont pas bénéficié de la vaccination. Afin de parler d’une seule voix en faveur de l’élimination de ces cancers, la coordination institutionnelle de ces deux interventions est fortement souhaitée.
  • Une planification annuelle avec des objectifs attendus et une évaluation régulière des actions devrait faire partie intégrante de ce programme

Chacun, aujourd’hui, doit prendre ses responsabilités pour que nous puissions offrir une chance égale pour tous et remporter collectivement une formidable et historique bataille contre le cancer. La France doit pleinement s’engager à prévenir ces cancers évitables et doit lutter contre toute perte de chance pour une partie importante des cohortes générationnelles actuelles.

Cet appel fait suite au workshop francophone du 9 février dernier qui a réuni à Bilbao, dans le cadre du congrès international EUROGIN 2023, acteurs français et européens de la lutte contre les cancers HPV- induits : « ÉLIMINATION DU CANCER DU COL UTERIN, Comment la France peut-elle parvenir à une stratégie nationale d’élimination des cancers HPV-induits ? »


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@PediatresAfpa