Une politique de réduction des inégalités aux effets modestes
Si la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de santé est une priorité régulièrement affichée par les pouvoirs publics, elle se heurte cependant à la pluralité des acteurs institutionnels (État, collectivités territoriales, organismes de sécurité sociale), dont les objectifs propres ne permettent pas de définir dans la durée une véritable politique visant à les réduire. Par ailleurs, malgré de nombreux dispositifs prévus pour assurer le suivi de la santé des enfants depuis leur plus jeune âge (dont vingt examens médicaux et cinq examens bucco-dentaires obligatoires), les résultats de ces derniers restent très difficiles à suivre. En 2019, par exemple, seuls 60 000 examens du 9ème et du 24ème mois ont été enregistrés par mois en moyenne, contre 125 000 attendus au regard des effectifs des enfants de ces âges. En 2018, moins d’un enfant sur cinq a bénéficié d’un examen par un médecin scolaire au cours de sa sixième année.
Réorganiser la politique de santé des enfants
Les deux réseaux d’acteurs historiques de la santé des enfants (PMI et santé scolaire) connaissent des difficultés importantes, régulièrement relevées. Ces difficultés s’inscrivent plus largement dans un mouvement de disparition progressive et d’éparpillement des compétences médicales et paramédicales spécialisées de l’enfant – en particulier en ville. En effet, la prise en charge des soins pour les enfants repose désormais majoritairement sur les médecins généralistes : en 2019, les pédiatres n’assuraient que 33 % des consultations des enfants de moins de 12 ans, concentrant leur activité sur les enfants de moins de deux ans habitant dans de grands pôles urbains et issus de milieux sociaux favorisés. Alors que la coexistence de plusieurs professions de santé dédiées à la santé des enfants (qu’il s’agisse de prévention ou de soins) aurait pu pallier les difficultés d’accès au système de santé, elles ont tendance à se cumuler dans certains territoires. La Cour estime en effet que des marges de manœuvre existent pour développer une politique ambitieuse de prévention et de promotion de la santé à destination des enfants. Dans cette perspective, elle formule trois grands axes de recommandations : l’amélioration de la gouvernance et du pilotage, le renforcement de l’offre de soins à destination des enfants et la construction d’un parcours de soins territorialisé. Réaffirmer l’importance du médecin traitant de l’enfant, qui ne concerne aujourd’hui qu’un enfant sur deux, constitue par exemple un levier pour mieux structurer le parcours de prévention et de soin de l’enfant, en lui confiant par exemple la réalisation des examens obligatoires et en inscrivant son action dans une démarche pluriprofessionnelle s’appuyant sur des délégations d’actes ou la reconnaissance en libéral des infirmiers de puériculture. Il pourrait s’agir du point de départ d’un investissement social, dont l’efficience se mesurerait, à terme, par l’amélioration de l’état de santé des adultes.